tu es la fille responsable de la famille. celle en qui on fait confiance, celle dont on est sûr qu'elle ne nous trahira jamais. tu es la fille sage, la fille de bonne famille. celle dont l'expression trop bonne, trop conne semble avoir été fait pour elle. tu es insipide, insignifiante. tu as toujours été dans l'ombre de toutes les autres personnes de ta famille. silencieuse, travailleuse. tu n'as jamais apporté le moindre problème à la famille. tu n'es pourtant pas la plus âgée, mais tu n'es pas non plus la plus jeune. le plus âgé des enfants de ta famille, il est parti en prison. tu étais trop jeune à l'époque pour en connaître les raisons, mais tout ce que tu sais, c'est que dans très peu de temps il entrera à nouveau dans ta vie. le second membre de ta famille, c'est ta grande soeur. c'est une sorte de monstre issu d'un autre temps. on aurait dit une femme tout droit sortie des années trente à cause de son allure. mais contrairement à toi qui est si sage, elle est en pleine révolution, n'acceptant plus aucune contrainte, plus aucun ordre, plus aucune personne osant lui dire ni même lui conseiller quoi faire. elle ne faisait que rester enfermée dans la maison, se traînant de sa chambre au salon en passant quelques fois par la cuisine pour se nourrir. ensuite il y avait toi. tu n'avais rien d'exceptionnel. tu étais à un point normale que tu en devenais barbante. on te rentrait dedans dans les rues, on ne s'excusait même pas. tu étais comme les murs, juste là pour empêcher les gens d'aller droit au but. ta mère, ton père, souvent ils t'avaient répété que tu devais essayer de te montrer un peu plus exceptionnelle, un peu moins classique. plus marginale, comme le reste de la famille. mais à chaque fois tu devais te retenir de leur hurler que tu ne voulais pas finir comme la folle tante kim, ou bien comme ton frère qui été resté plus longtemps en prison qu'en ta compagnie. et tu partais alors t'enfermer dans ta chambre, essayant en vain de travailler alors que ta petite sœur dans la chambre d'à côté s'amusait bien. bruyante, comme à chaque fois. tu te demandais pourquoi tes parents n'avaient toujours rien dit. elle couchait à droite à gauche. une honte de la société coréenne. une honte de la société tout court. tu ne serais même pas étonnée si un jour, sans aucune gêne, elle viendrait t'annoncer qu'elle était enceinte. tu avais atterri dans une famille de barges, et parfois, tu regrettais d'avoir été épargnée par la tare de ta famille. tes écouteurs dans les oreilles, tu plongeais dans tes livres, espérant un avenir meilleur.

mais tu n'étais pas au bout de tes peines.

tu ne t'étais pas trompée sur tes prédictions. 5 mois plus tard, alors que ta sœur venait à peine d'avoir 17 ans, elle est tombée enceinte. tu ne fis même pas semblant d'être étonnée. c'était presque normale, la simple continuité des choses. mais ce qui t'as, par contre, bien contrarié, c'était l'annonce de ta mère. « elle ne peut pas s'en occuper. » t'avait-elle dit, et sur ce point, tu ne pouvais qu'acquiescer. « ça sera donc toi qui en sera responsable. » tes yeux s'ouvrirent en grand alors que tu te retenais d'hurler. cette fichue retenue, ce calme que tu tenais toujours tant à garder  commencer peu à peu à se briser. pourquoi devais-tu t'en occuper, toi ? etait-ce la vengeance de ta mère parce que tu étais trop normale ? voulait-elle te rendre folle avec de telle demande ? « on dira à tout le monde que c'est le tien, et que le père t'as abandonné. » et avais-tu ton mot à dire ? non. c'est vrai qu'avec tes 20 ans, il était bien plus ' normal ' que tu tombes enceinte. mais quand bien même, tu ne voulais pas t'en occuper ! tu avais un avenir, tu avais des projets. tu voulais gagner ta vie, ton indépendance grâce à ton travail, et tu te voyais une nouvelle fois enchaînée. cette famille t’amènera à coup sur à ta perte. et neuf mois plus tard, tu étais maman de substitution. les gens te regardaient bizarrement avec ce petit être dans les bras. ils te jugeaient, ils te disaient irresponsable. ils te collaient une étiquette qui n'était pas la tienne, pendant que ta sœur elle, continuait sa vie comme si de rien n'était. et tu t'imaginais ton futur, toujours coincée dans cette maison, ton désormais fils développant les mêmes tares que les autres. mais tu ne pouvais pas accepter ça. tu ne pouvais pas accepter le fait qu'une nouvelle personne souffre à cause de ces être. alors, à 21 ans, tu partis de chez toi, comme une grande. tu partis de ta petite ville natale pour atterrir à daesan. et ton frère sortait de prison.

et ce fut peu de temps après que tu découvris ta propre tare.

ton frère est venu chez toi. il avait préféré vivre aux côtés de sa sœur si sage plutôt que le reste de la famille déjanté, pour se calmer. tu avais vu ça d'un mauvais oeil. tu n'avais pas envie qu'un ex-taulard vive avec toi et ' ton ' fils. mais d'abord réticente, tu avais fini par l'accepter. et l'accepter à tel point que tu avais fini par tomber amoureuse de lui. les tares de ta famille n'ayant apparemment aucunes limites.